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  • Photo du rédacteurJaeger & Compâgnie

Roméo vers Compostelle 2. Le Puy-en-Velay à Montbonnet

Dernière mise à jour : 7 août 2021



J'ai prévu de faire une petite journée pour ce départ. On est dimanche, je suppose qu'il y aura beaucoup de monde sur ce chemin, je pense donc créer un décalage dès le début.


L'étape "officielle" va du Puy jusqu'à St Privat d'Allier. Je ne comprends pas trop d'ailleurs car cela fait une longue étape pour un premier jour (25 km environ) et cela n'a plus lieu d'être. En effet, les pèlerins du XVIIIème siècle s'arrêtaient dans certaines communes car ils n'avaient pas le choix, il n'y avait aucun hébergement entre ces villes. À notre époque, il y a des gîtes, des accueils ou des campings dans quasiment chaque village traversé. Je ne sais donc pas pourquoi les gens s'acharnent à faire ces étapes, surtout que certaines sont vraiment longues et difficiles, d'autres très courtes, la logique m'échappe. Car s'ils veulent suivre exactement les premiers pèlerins... Dans ce cas les chemins actuels n'existaient pas non plus et pour être honnête... Il est assez connu, dans divers récits et témoignages, que les premiers pèlerins suivaient les cours d'eau plutôt que monter en haut des sommets. Bref. Ces étapes prédéfinies sont quand même sympas pour se donner une idée de l'avancée qu'on peut avoir.


On prend notre temps ce matin, petit déjeuner au gîte (exceptionnel), rangement du matériel, rééquilibrage des sacoches, chargement de tout le bardas et de Kiki dans la voiture.

Puis au tour de Roméo... Il a passé 9 heures dans le van vendredi, je me dis qu'il va avoir au moins une hésitation pour monter ce matin.

En effet... La preuve en vidéo !


On a repéré la route hier, pour éviter de se perdre avec Roméo derrière, mais on trouve quand même le moyen de ne pas tourner au bon endroit. Demi tour, on se retrouve sur la bonne route et on arrive sur le lieu de stationnement. Je rigolais hier en voyant que j'allais commencer en haut de la côte qui sort de la ville. J'évitais le centre ville avec ma troupe mais je zappais également cette longue montée dont j'ai plusieurs fois entendu parler. En même temps, sans faire ma vieille rabat-joie, se plaindre de cette côte c'est compréhensible mais bon, quand on se lance sur un périple comme ça, on sait d'avance que parfois ça va monter alors...Si c'est pour se plaindre dès la première heure, c'est peut-être signe qu'on a mal étudié le truc. Je sors Roméo et commence à le préparer. On voit déjà pas mal de marcheurs qui passent. Beaucoup. Et des photos, des questions, tout ce qui m'est devenu habituel, avant même d'avoir terminé de bâter Roméo. C'est le jeu, je le savais, je connais la fréquentation de ce chemin notamment un dimanche mais j'aimerais le préparer tranquillement. On n'est jamais à l'abri d'une erreur d'inattention quand tout le monde nous saute dessus à un moment aussi important. D'ailleurs, je vous en offrirai la preuve dans une grosse dizaine de jours. Parfois, nous déconcentrer pendant le rangement ou le bâtage peut conduire à la catastrophe. Je ne vous en dis pas plus, il faudra être patients, je peux juste vous dire que ça aurait pu être catastrophique. De mon unique faute (j'en ai vraiment plus que honte) mais parce que quelqu'un me tenait la grappe à ce moment-là. J'aime échanger, discuter, partager mais pas quand je dois être concentrée sur ce que je fais (ni quand je suis posée pour manger d'ailleurs ahah). J'ai beau avoir l'habitude et faire tout ça de manière quasi mécanique depuis le temps, il faut que je sois à ce que je fais. Voilà, Roméo est prêt, Kiki est au bout de sa laisse, c'est le départ ! Guy nous prend en photo, on se dit à bientôt et je fais mes premiers pas sur ce chemin.

Roméo commence vite, limite à trottiner sur place. Normal, il y a du monde et beaucoup de bâtons. Le bruit des bâtons, je crois que c'est bien la seule chose qui l'inquiète et le met mal à l'aise. Quand ça arrive par derrière, il n'aime vraiment pas. J'avoue que moi aussi, je déteste ce bruit. Autant que les gens qui font du bruit avec leur bouche quand ils mangent. Oui la comparaison vous paraît sûrement bizarre mais c'est le genre de chose qui m'exaspère au point que je parviens difficilement à me contrôler. Paraît qu'il y a un mot pour ça : la misophonie. Bah le bruit des bâtons pour moi, c'est pareil.

J'échange quelques mots avec d'autres randonneurs. Je me rends compte qu'il y a une véritable différence entre ces termes : marcheur, randonneur, pèlerin, voyageur. Et ce matin, je parle surtout avec des randonneurs. Quand j'ai créé ce blog, et cette page sur Facebook, j'étais une randonneuse. Je prévoyais des trajets, un nombre de kilomètres (approximatif), je regardais chaque jour combien de kilomètres j'avais fait, en combien de temps, à quelle allure. Depuis que je marche avec mes ânes, j'ai, sans m'en rendre compte au début, changé de catégorie. Les premières fois, j'essayais de fonctionner comme avant. Petit à petit, j'ai adopté une façon de faire qui d'abord, convient à mes doudous à grandes oreilles, mais aussi à ma manière d'être. J'aime admirer le paysage, m'arrêter pour sentir les odeurs, m'extasier sur un détail. J'aime perdre une heure à échanger avec une personne rencontrée sur le chemin. J'aime faire un détour pour observer un point de vue, ou faire une coupe dans le circuit pour éviter un endroit qui sur carte me paraît inutile. J'aime parler aux vaches, aux oiseaux, aux animaux aperçus derrière une haie ou un fil. J'aime regarder mes ânes se délecter d'un bouquet de chardons. Je ne résiste pas à l'idée de voir mes doudous se vautrer dans l'herbe alors qu'on a fait une pause 200 mètres plus tôt. En bref, j'aime prendre le temps. Profiter de ce que les chemins nous apportent. Je perds du temps ? Non. Je ne suis pas dans la recherche d'exploit sportif. Je m'en contrefous de la vitesse à laquelle j'ai fait une étape. Je ne sais pas quel poids fait mon sac à dos (hormis le fait qu'il devrait être bien plus léger étant donné que mon âne porte la plus grande partie du matériel). Je vis, je profite de la chance que j'ai de partir comme ça. Je voyage. Et "je kiffe".


Dans un sentier pas très large, je suis trois hommes qui s'arrêtent parler avec un monsieur qui marche en sens inverse. Je passe et ce monsieur me dit juste une phrase : " Attention à Ramourouscle, il y a des chiens, et il y a eu plusieurs petits chiens attaqués et tués". Même pas le temps de respirer ni de répondre, il est reparti. Vous me connaissez... Le stress monte. Voilà, il m'a foutu la trouille. Super. J'ai tellement bien étudié mon parcours que je ne sais même pas dans combien de temps c'est, Ramourouscle. Je m'arrête 5 minutes pour faire boire Roméo (qui ne veut pas d'eau) et Rikiki et je regarde vite fait le Miam miam dodo. Ok, c'est aujourd'hui mais je ne sais pas dans combien de temps. Je verrai bien quand il y aura des panneaux hein. Je rattrape les 3 hommes de tout à l'heure, le père et ses deux fils. Je leur raconte ça et leur demande si je peux les coller jusqu'à ce village. J'ai la trouille et... Ils ont des bâtons. Ils me rassurent en me disant que c'est certainement des conneries, je pense aussi finalement. Mais quand même... Ce vieux c----- m'aura gâché cette première journée. Il vaut mieux ne rien dire en fait. Je m'arrête en même temps qu'eux pour la pause déjeuner. Plusieurs personnes nous rejoignent. Une mère et sa fille, qui veulent aller jusqu'à Compostelle. Une mère, Laurence, et son fils qui se donnent quelques semaines. Et bien d'autres... Ces rencontres sont toutes très agréables, même si j'ai l'impression d'être l'attraction, avec mon âne et ma chienne qui couine dès qu'on s'arrête. Enfin couine... Non, elle couine et elle aboie. Ok, Rikiki ne supporte pas qu'on s'arrête. Ça va lui passer hein...


On repart, tranquillement. François et ses deux fils finissent par nous semer, ils doivent aller jusqu'à St Privat d'Allier aujourd'hui. Je suis bientôt rejointe par Laurence, son fils est devant avec François et sa famille. On marche, on papote, elle s'arrête discuter avec (?), la mère et sa fille que je reverrai plusieurs fois, et je finis par continuer à avancer seule avec Roméo et Rikiki. Je vois une bande d'herbe, je m'y arrête pour faire plaisir a Roméo et je vois ce panneau, à quelques centimètres de moi : "Ramourouscle". Merde. Le seul moment où je suis seule. Bon... Faut quand même qu'on avance. Prudemment et totalement détendue (non, je déconne) j'avance. J'aperçois quelques chiens en liberté dans le village, ressemblant vaguement à des border. Oui vaguement. Comme dans toute campagne : des bâtards noirs et blancs quoi. Des chiens de ferme. Aucune critique de ma part hein. Juste un amour des races pures et un respect des éleveurs qui se battent pour faire comprendre ce qu'est la sélection, ce que sont les tests de santé et de caractère, les choix de mariages et tout le reste afin de produire des chiens de qualité que ce soit morphologiquement, psychologiquement ou encore en terme de santé. Pour préciser, Rikiki est issue de deux parents "type" Basset fauve de Bretagne, donc sans LOF, qui ne devraient pas avoir le droit de reproduire, et elle est "difforme", dans le sens où elle est totalement hors du type défini par la FCI pour sa race. Toujours est-il qu'en voyant ces chiens, je me rassure un peu en me disant qu'un coup de Lowa en travers la tronche ça devrait pouvoir m'aider à régler les conflits s'il y en a. Prudemment je traverse le village et en sors indemne malgré des aboiements assez impressionnants de chiens invisibles derrière des portes de grange. Dans la petite montée vers Montbonnet, je retrouve François et ses fils ainsi que le fils de Laurence. En nous voyant, ils se confondent en excuses : ils ne nous ont pas attendus et s'inquiétaient. Je les rassure en leur disant que je ne leur en voulais pas d'avoir avancé, ils marchent au rythme qui leur convient. C'est vrai, chacun son chemin, ils ne vont pas attendre à chaque fois que quelqu'un se fait une frayeur. Le fils de Laurence me raconte qu'en plus, à Ramourouscle, il a aperçu entre les planches de la porte d'une grange, un chien qui lui a fait vraiment peur et qui avait l'air méchant "genre un Pittbull tu vois". Bon bah bien contente de ne pas l'avoir vu hein !

On avance et on voit une jolie chapelle comme il y en a tant sur ce chemin. Il y a du monde et rien pour attacher Roméo, je ne m'arrête donc pas. Mais plus loin, je retrouve Laurence qui me propose de surveiller Roméo le temps que j'aille voir. Ok, je l'attache au panneau et je redescends vers cette chapelle avec Rikiki. Elle, je l'attache juste à l'entrée. Déjà que je suis mal à l'aise d'entrer en short et en casquette dans une chapelle, hors de question d'entrer avec ma chienne. Question de respect.


On arrive à Montbonnet. Apparemment, il y a une fontaine, du moins un endroit pour faire boire mes loulous. Je suis le petit panneau, il faut sortir du GR sur un petit tronçon de quelques centaines de mètres. Et ce qui est marrant, c'est que personne ne quitte le GR. Les gens ont apparemment peur de perdre du temps. Oui, comme je disais plus haut, le principe de la randonnée. Suivre le tracé, ne pas perdre de temps. Un petit chien arrive en nous aboyant dessus. Suivi de deux jeunes filles, collégiennes sûrement. Elles sont ravies de voir Roméo, et l'une d'entre elles, habitant le village, me montre même le robinet d'eau potable "pour les humains". Du coup, je leur demande si elles connaissent un endroit où je pourrais planter ma tente ce soir, avec de l'herbe pour Roméo. Et bien, j'ai bien fait ! Juste à côté de l'eau, la petite me montre un endroit où je peux m'installer. Son papa travaille pour la commune, elle m'assure que je ne dérangerai pas. Du coup il est encore tôt mais je pose les bagages !

Comme il n'y a pas vraiment de quoi attacher Roméo à l'aise, je monte le parc pour lui. Les deux jeunes filles et leur petit chien restent un long moment avec moi. Elles papouillent Roméo, s'amusent avec Rikiki, elles sont gentilles comme tout. Et ma Kiki a été prise une bonne centaine de fois en photo, et doit être sur plusieurs posts sur les réseaux ? Quand elles finissent par me quitter, je monte ma tente.



L'agriculteur d'à coté ramène ses vaches pour la traite. Ses chiens, pas très loin de nous, ne me rassurent pas mais jamais ils ne viennent jusqu'à nous.


Pas mal comme premier bivouac d'une longue série !



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